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Avril-Mai*, Auteuil
Groupe 3, 5ans et au-dessus, Steeple-Chase, 4 400 mètres, 100 000 €
Créé en 1946
Tenant du titre : Figuero (h5, FRA par Yeats et Annaland, par Saint des Saints), appartenant à Jacques détré, François Nicolle & Thierry Cyprès, élevé par Thierry Cyprès, entraîné par François Nicolle, monté par Angelo Zuliani.
La course se déroule en 2021 pour la 76ème fois
Mardi 22 septembre 2020, Auteuil. – C’est un Prix Ingré (Gr3) inhabituellement automnal qu’a remporté cette année le 5ans AQPS Figuero (Yeats) sous les couleurs de Jacques Détré. En effet, cette préparatoire au Grand Steeple-Chase de Paris (Gr1) qui emprunte le parcours extérieur des steeple-chases d’Auteuil se déroule généralement en avril-mai, mais la grande épreuve ayant été déplacée à l’automne, ce tremplin l’a suivie ici.
Ce furent 4 400 mètres animés puisque la favorite Ebonite (Kahalkevi) est tombée au deuxième obstacle, au tournant d’Auteuil, tandis que Srelighonn (Martaline) l’a imitée au mur alors qu’il était encore en course.
La plupart des concurrents, pour être honnête, étaient encore en course également alors que les leaders Enjeu d’Arthel (Saddler Maker), Device (Poliglote) galopaient avec Roxinela (Muhtathir), Feu Follet (Kapgarde) et Carriacou (Califet), Figuero (Yeats) galopant alors un peu en retrait après un saut laborieux au rail-ditch-and-fence, comme Fou Délice (Poliglote).
Entre les deux derniers obstacles, cependant, la situation allait se décanter un peu puisque seuls demeuraient Feu Follet, Device, Figuero, bien revenu après un bol d’air, et un courageux Carriacou s’apprêtaient à lutter pour la victoire.
Cette fois, le 5ans Figuero a eu le dernier mot et s’est imposé au finish de 3 longueurs sur un Device décidément revenu à son bon niveau, Carriacou terminant sur le podium à une bonne longueur. Feu Follet a craqué pour finir, après Roxinela et Enjeu d’Arthel.
Rien n’est joué et la saison de steeple promet d’être passionnante.
Entraîné près de Royan par François Nicolle, Figuero est le gagnant l’automne dernier du Prix Maurice Gillois (Gr1), ce qui fit de lui le meilleur chaser de sa génération. Il avait confirmé son potentiel cette saison en s’imposant pour son retour face à des chevaux d’âge sur les haies de Compiègne mais avait été nettement battu ensuite à la quatrième place du Prix Murat (Gr2). Il avait donc une revanche à prendre ici.
Figuero est le premier produit de l’AQPS Annaland (Saint des Saints), qui a depuis donné cinq poulains dont trois femelles par Lord du Sud, Vision d’État et Free Port Lux. Un mâle, désormais hongre, par Montmartre est né en 2017, et un autre poulain par Cokoriko est né en 2020. Annaland a été entraînée mais elle n’a pas couru. Elle est issue de Palmaland (Arnaqueur), elle-même fille de la très bonne jument Queensland IV (Citheron), mère des bons Embiez (Lute Antique) et Cumberland (Cyborg), gagnant du Prix Maurice Gillois.
Cette appellation fut donnée en 1946 à une course préparatoire au Grand Steeple-Chase de Paris. Ingré, qui venait d’achever une fabuleuse carrière à 13 ans en 1945, était, à l’époque, seulement le troisième cheval parvenu à remporter deux fois l’épreuve phare d’Auteuil, les précédents étant Wild Monarch (1878, 1879) et Dandolo (1904, 1908).
Le premier Prix Ingré, qui eut lieu le 25 avril 1946, eut pour vainqueur Jupin qui ne disputa pas le Grand Steeple. Rameau, second lauréat en 1947, dut s’incliner dans le Grand Steeple devant Lindor qui n’avait pu obtenir que la cinquième place dans le Prix Ingré. Mais dès 1948 Ridéo réalisa le doublé. Ainsi sur la voie menant au Grand Steeple, le Prix Ingré joue un rôle éminent, comme en témoignent les noms des grands sauteurs inscrits à son palmarès.
Après Ridéo, 14 autres chevaux ont gagné la même année le Prix Ingré et le Grand Steeple. Ce sont : Hyères III (1966), Haroué (1968), Mon Filleul (1978), Isopani (1981), Sir Gain (1985), Oteuil SF (1987), Katko (1988, 1989), Ucello II (1994), Al Capone II (1997), Kotkijet (2001, 2004), Mid Dancer (2011), Bel La Vie (2013), Storm of Saintly (2014) et Milord Thomas (2015). Sept autres chevaux ont aussi remporté les deux courses mais pas la même année. Ce sont Loreto (Ing 1961, Gd St 1963), Morgex (Ing 1971, Gd St 1972), Brodi Dancer (Ing 1983, Gd St 1984), Jasmin II (Ing 1984, Gd St 1983), The Fellow (Ing 1990, Gd St 1991), Ubu III (Ing 1992, Gd St 1995) et Mid Dancer (Ing 2009, Gd St 2007).
A noter que six chevaux ont gagné deux fois le Prix Ingré : Rameau (1947, 1949), Quo Vadis (1954, 1955), Katko (1988, 1989), Chamberko (1996, 1997), Al Capone II (1997, 1999) et Kotkijet (2001, 2004).
Ainsi on a enregistré en 1997 un dead-heat (ex æquo) entre Chamberko et Al Capone II à l’issue d’un duel inoubliable.
(*) exceptionnellement en 2020, le Grand Steeple-Chase de Paris eut lieu en octobre en raison des annulations du premier semestre à Auteuil, elles-mêmes dûes à l’épidémie de coronavirus. Le Prix Ingré quivit le mouvement pour préarer, comme d’habitude, au classique d’Auteuil : il se disputa le mardi 23 septembre.
Ingré
Né en 1932, ce hongre bai par Hélion et Diplomée (Durbar) a été élevé au haras de la Louvière (Orne) par Paul Chamon. Devenu la propriété d’un petit entraîneur de Maisons-Laffitte, Fernand Drouhard, il court six fois sans succès à 2 ans, gagne un handicap à 3 ans. Dressé sur les obstacles, il court six fois en haies à l’automne pour gagner deux courses à Maisons-Laffitte et à Auteuil. C’est là qu’il est remarqué par l’entraîneur Joseph Ginzbourg qui le fait acheter par Arthur Veil-Picard. Dès le 29 décembre, Ingré offre une victoire à Nice à son nouveau propriétaire.
A 4 ans, Ingré est dirigé sur le steeple. Pour sa première tentative à Auteuil, il tombe mais son jockey le remonte pour décrocher la troisième place car il n’y avait que quatre partants. Encore une chute à Enghien, mais avec le temps Ingré apprend son métier. Une victoire à Enghien et trois sur le petit steeple d’Auteuil préludent à deux déplacements, l’un victorieux dans le Grand Steeple de Deauville à Clairefontaine, l’autre en Italie où il se classe second du Gran Premio di Merano.
En 1937 à 5 ans, Ingré semble à son apogée. Pour ses six premières sorties, cinq victoires dont le Grand Prix de la Ville de Nice, le Prix Murat (73,5 kilos) et le Grand Steeple sur le tapis vert, bénéficiant de la rétrogradation de Larringes qui avait versé longuement sur lui après le saut du dernier obstacle. A l’automne un retour victorieux à Auteuil sous 73 kilos et un déplacement outre-Manche pour faire connaissance avec les obstacles d’Aintree. Le champion d’Arthur Veil Picard est recalé à cet examen de passage en vue d’un éventuel Grand National en tombant au deuxième obstacle, le « chair », où il s’est permis de « brousser ».
A 6 ans, son entourage décide de faire l’impasse sur un second Grand Steeple (dans lequel il devrait porter une surcharge de dix livres imposée à tout ancien lauréat) et d’axer sa campagne sur le Gran Premio di Merano que son compagnon Empressor a gagné en 1937. Réapparition seulement en août à Clairefontaine où il gagne en plat et se place troisième dans la Grande Course de Haies. Hélas en septembre 1938, la tension internationale est si vive que le déplacement d’un champion en Italie s’avère trop risqué. En guise de consolation, Ingré glane à Auteuil trois courses et la deuxième place du Prix La Haye Jousselin.
En 1939, c’est décidé, le but est un second Grand Steeple malgré la surcharge. En attendant, cinq courses soldées par deux victoires (à Nice et Enghien) et trois places dont celle de deuxième du Prix Murat sous 75 kilos. Et le 18 juin, mission accomplie. Portant 74 kilos, Ingré devance de quatre longueurs son compagnon Un Mitrailleur dans la course phare d’Auteuil. Mais à peine connue la gloire, survient la guerre avec la cessation des hostilités sur les hippodromes. Seule une brève reprise au printemps 1940 permet à Ingré de remporter un second Prix Murat sous 74 kilos avant une nouvelle interruption des courses.
Pour beaucoup de vieux chevaux s’achève alors leur carrière avec l’exode, la fuite devant les armées ennemies et l’Occupation. Sa trace un moment perdue, Ingré est retrouvé… pour reprendre le turbin. Recherché par la Gestapo, Joseph Ginzbourg se cache. Avant que les biens de son propriétaire juif soient confisqués, Ingré est confié à l’entraîneur Joachim Bédeloup. Sous la casaque de celui-ci, il reparaît en 1941 et se distingue encore en se classant troisième du Grand Steeple tout en portant la sempiternelle surcharge, relevée cette année à douze livres.
En 1942, Ingré a 10 ans. Soupçonné d’être le simple prête-nom d’un juif, Bédeloup se voit contraint de céder Ingré à un certain André Carré (installé au Mans et détenteur d’une licence de gentleman-rider) qui va exploiter l’ancien crack pour quatre campagnes à but lucratif. Du 22 mars 1942 au 17 août 1945, Ingré est obligé de prendre part à quarante-trois courses, onze en plat, trente-deux en obstacle. Il roule sa bosse pendant quatre ans sur une dizaine d’hippodromes différents. On le voit gagner deux fois le Prix Claude de Langle à Craon. A Auteuil, on l’admire quand il enlève les Prix Cher Tatoué (70 kilos), Marescot et Léon Olry-Roederer ; on le plaint quand il tombe deux fois, dans les Prix Murat et Agitato ; on est indigné de le voir supporter toujours la surcharge de dix livres dans le Grand Steeple qu’il dispute encore à 11 ans et dont il se classe cinquième ; on est triste de le revoir au même rang l’année suivante mais soulagé de l’absence de surcharge. C’est sa cinquième participation.
A 13 ans, le 10 avril 1945, Ingré change encore de propriétaire. Vendu à la requête de l’Administration des Domaines, il est acheté par l’entraîneur Horace Haes, responsable de ses quatre dernières exhibitions. L’ultime a lieu le 17 août à Enghien, en queue d’un petit peloton de sept partants. Un tendon postérieur est claqué. Mais les deux antérieurs sont droits comme un i. C’est sa cent-dixième course. Bilan : vingt-huit victoires et vingt-neuf places pour soixante-dix-neuf courses en obstacle ; trois victoires et six places pour trente et une courses en plat. C’est à la solidité de ses jambes et à son extrême bonne volonté – il n’a jamais refusé un obstacle – qu’il a dû le report d’une retraite que la plupart des sauteurs obtiennent beaucoup plus tôt. C’est la rançon d’être hongre et sans tares.
De retour en France, le fils et le gendre d’Arthur Veil Picard (décédé en 1944) rachètent Ingré. Dans l’écurie de Joseph Ginzbourg (lui aussi revenu), il retrouve même box et même lad. Chaque jour, il effectue joyeusement un petit galop de santé sur une piste de Maisons-Laffitte. Un matin, il s’écroule. Il avait vingt-deux ans.
N.B. Extraits du livre Auteuil hier et aujourd’hui (tome 2, 1916-2003) de Guy THIBAULT (Editions du Castelet).